La formule magique de l’industrie du luxe : petit logo = produit cher
La taille du logo d’un produit de luxe est-elle inversement proportionnelle à celle du portefeuille de son acquéreur ?
Cette question a fait objet d’une savante étude menée par des étudiants de l’Université de Chicago. Ses résultats, calculés au millimètre près, ont été présentés jeudi 17 juin par Jean-Noël Kapferer, expert mondial des problèmes de marques, lors d’un colloque organisé par Ipsos, HEC Paris et l’association des professionnels du luxe à l’Opéra Garnier de Paris.
Ils sont des plus instructifs. Les chercheurs ont analysé les 236 sacs à main vendus sur le site américain de commerce en ligne de Louis Vuitton (LVMH) et les 229 sacs vendus par la marque Gucci (PPR). Ils ont ensuite mesuré la taille du logo, effectué un ratio par apport aux mesures des sacs à main et rangé ces données sur une échelle, graduée de 1 à 7 en fonction du caractère plus au moins discret du logo et selon un autre critère, le prix.
Résultat : ‘Plus le logo est gros, plus le prix du sac est accessible’. Pour être plus précis, chaque centimètre de logo supplémentaire sur un sac Gussi réduit son prix de 122 dollars (98 euros). Pour Louis Vuitton, le centimètre supplémentaire fait moins diminuer le prix du sac (26 dollars seulement).
Les Mercedes aussi
La règle s’applique aussi aux voitures de luxe. La même étude a été élargie aux Mercedes. Le logo placé à l’avant de la Class A mesure précisément 13 centimètres, tandis que celui du cabriolet Class E n’est que de 5,5 centimètres.
Ce qui fait immédiatement conclure aux auteurs de l’étude, après avoir mouliné de nombreux facteurs objectifs (taille de la voiture, puissance du moteur…), que chaque centimètre de logo Mercedes supplémentaire abaisse de 5000 dollars la facture de l’automobile.
S’il est désormais acquis scientifiquement que ‘petit logo = produit cher’, une autre étude récemment commandée par l’Association des professionnels du luxe auprès d’un millier de personnes appartenant à la catégorie des 10 % les plus riches au Royaume-Uni, en France, aux Etats-Unis et au Japon, devrait réconcilier tout le monde.
Interrogés en mars, ils étaient 75 % à considérer qu’ils avaient payé ‘trop cher’ leur dernier achat dans le luxe. éclair de lucidité de ces consommateurs fortunés ? Ou signe imparable de l’étonnante magie de certaines marques malgré la crise ? Sans doute plutôt la deuxième hypothèse, puisque ces clients ont continué à acheter.
Source : Le Monde, mardi 22 juin 2010, par Nicole Vulser